Piscine Molitor
Aujourd'hui dans mon sac il y a...
Sur la plupart des photos que l'on connait de lui, Boris Vian a un grand regard triste. Même lorsqu'il sourit.Et il ne sourit pas si souvent. Les pages de Cailleaux et Bourhis nous entrainent juste derrière ce regard , juste derrière le sourire, vers la famille unie de l'enfance, la ruine de ses parents en 1929, la fuite devant la guerre vers les plages du sud , son coeur qui lui fait faux bond à l'âge ou l'on voudrait courir toujours plus vite,toujours plus loin, les livres, les mots, les amis , les amours, son esprit brillant et souvent incompris, en avance sur son époque parce qu'il n'avait pas le temps d'attendre...Ces pages sont un air de jazz, des photos de Saint-Germain des Prés en noir et blanc , la côte d'Azur avant la foule. On y croise Queneau et Menuhin, Sartre et Juliette Gréco. On y regarde Boris écrire, inventer, se battre,provoquer, se decourager , s'enivrer de musique , souffler dans sa trompette à longueur de nuits,et plonger en apnée. Quitte à en mourir . Le matin du 23 juin 1959 il se rend à la piscine Molitor où il a ses habitudes, il plonge, il cotoie la profondeur, il retient son souffle fragile . Dans quelques petites heures , avant la fin de la projection de l'adaptation cinématographique de "j'irai cracher sur vos tombes " à laquelle il assiste , il sera mort. A 37 ans. C'est peut-être pour ça qu'il avait le regard triste, parce qu'il savait.et en refermant ce livre qui le raconte si bien , on a soudain très envie de rouvrir les siens...