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dansmonsacdefille
11 octobre 2007

petite histoire sans importance

Il s'en serait fallu de peu.

Quelques minutes, une seule, une poignée de secondes peut-être.Juste un petit instant de moins...

Dans le coeur de M. depuis si longtemps qu'elle aurait pu dire toujours,le prénom de P., son visage brun,ses yeux comme du velours lissé,une mèche de cheveux , noire .un souvenir tendre et tenace, rien qu'à elle  mais discipliné, bien rangé depuis toutes ces années.le souvenir d'un amour battant de toutes ses forces à son coeur,de doigts chauds entrecroisés dans les  siens,de moments où tout semblait possible,d'attente près du telephone mêlé à la douleur du doute, de la resignation, , du deuil de son histoire perdue.un jour après de nombreux autres il avait bien fallu se resoudre et arrêter d'attendre ce qui ne viendrait jamais: Ce ne serait pas lui qui sourirait à ses côtés au banquet de mariage et sous une pluie piquante de riz, ce ne serait pas lui qui tiendrait leur enfant au-dessus d'un berceau pastel, et cet enfant même ne serait jamais.C'était ainsi.

Elle avait tout de même gardé au fond d'une boîte , derrière des livres, quelques petites pierres d'un voyage lointain, de la monnaie étrangère, et un échantillon de parfum qui contenait à lui-seul la petite  musique de ces années-là, des pas de danse, des week-ends entiers d'hiver, des quais de gare,des promenades sous des réverbères, un automne le long d'un fleuve,des courses de noël, des petits restaurants et des nuits sans sommeil.S'il lui arrivait encore de l'ouvrir rapidement, elle se demandait bien des choses à son sujet et espèrait vagement que le hasard les ferait à nouveau se croiser.Se croiser, simplement. Elle imaginait ce qu'ils se diraient alors, leur confusion, leur plaisir étonné sans doute.

Mais aujourd'hui, le coeur depuis longtemps joyeusement recousu, elle marchait dans cette rue de sa ville, les ailes invisibles d'un bonheur reconquis flottant à son dos et la maintenant dans sa course légère imperceptiblement au-dessus du sol, juste au-dessus. La page était tournée et elle cultivait chaque jour comme la plus délicate des orchidées un nouvel  amour apprivoisé, infiniment tendre et rassurant ,qu'elle sentait aussi inaltérable et confiant que le sourire de ses enfants.Elle tenait par la main, sa fille.Du rouge à fleur de joue sous le froid d'un après-midi d'hiver, un petit fruit bien mûr, une framboise gorgée d'été,une pomme au soleil d'automne.De longs cils, des papillons.des yeux comme deux petites perles sombres,un sourire rosé, une petite main gantée de laine multicolore, une écharpe à son cou,deux courtes nattes espiègles et dorées s'echappant de son bonnet. Et à travers leurs gants , toute la chaleur de leur amour partagé, cercle parfait et indestructible.

De son côté P. au début, lui telephonait, lui envoyait des lettres, des cartes postales de temps en temps.Puis , un jour, il avait céssé d'ecrire.Son nouvel amour ne lui avait rien demandé mais il avait pensé que c'était mieux ainsi et puis la paresse aussi, ce que l'on remet sans cesse à demain, à plus tard et qui s'éloigne à mesure.Mais avouerait-il même à son meilleur ami qu'il avait encore parfois la tentation de composer son numéro de telephone?De s'aventurer jusque dans sa rue?De griffoner quelques lignes à son attention?Que deviens-tu?Comment vis-tu?De quoi se remplissent tes jours? As-tu changé depuis tout ce temps?

Il marchait ce jour-là dans cette même rue d'hiver parmi quelques passants emmitouflés et bavards mais il les voyait sans les regarder leur preferant ses pensées. Il avait beaucoup,de souvenirs dans cette ville, pas tous bons mais au moins avaient-ils le merite de le ramener à une jeunesse qui commençait à lui sembler lointaine.Petite île au large , pages de cahiers refermés,encre passée. L'air était clair et perlé de givre.Un soleil blanc projettait des ombres allongées de silhouettes encapuchonnées,de grands manteaux, de bonnets.Peut-être y aurait-il bientôt de la neige? Les vitrines colorées attiraient les passants comme la lumière les papillons.Il avait tout son temps, avait improvisé cette balade et comptait bien la savourer. petit plaisir d'hiver dans un parfum de châtaignes grillées,les mains  réchauffées au creux de ses poches.Il allait, sans but,presque leger.

A quelques mètres droit devant lui une petite fille avec gants et écharpes colorées, éclats d'été sur decembre, bavardait joyeusement avec une jeune femme qui était probablement sa mère.Un joli tableau.Un duo vif et aimant, plein de son attention l'une pour l'autre.S'il avait eu une petite fille elle lui aurait peut-être ressemblé.cette pensée s'envola comme elle était venue.Elles avançaient vers lui sans même le voir.Soudain la petite fille designa une vitrine et entraina sa mère dans sa direction.Elle se laissa faire en souriant.Il passa alors à leur hauteur sans devier de son chemin, sans plus tourner la tête dans leur direction.Elles étaient sorties de sa trajectoire et il allait , droit devant lui.

il y avait quelques promeneurs malgré le froid mais elles ne leur pretaient pas d'attention particulière car leur conversation emplissait l'instant en délimitait les contours fermés et personne n'y serait entré.soudain sa fille aperçut un livre dans une vitrine.elle voulait montrer, interroger, expliquer, c'était comme un impératif. Elle la suivit et se pencha à sa hauteur.Son petit cou sentait la brioche tiède du gouter, un pique-nique au soleil,la peau juste après le bain.Attentive à ses explications elle ne remarqua même pas le reflet de l'homme qui passait dans son dos.Il avançait sans presser le pas, fidèle au tempo de sa promenade.Une mèche noire, des yeux veloutés.

Elles reprirent leur promenade.Il était déjà passé.

Pourtant, il s'en serait fallu de peu.

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Commentaires
B
oh merci Youlia!!!!!!!!!!!!!!!!!!! à bientôt!
Y
T'as bien fait de le laisser ce texte. J'aime beaucoup l'ambiance, je me suis fait prendre par ton histoire très facilement, tu as une jolie plume, ça glisse. Continue.
A
Ah ! Je savais bien qu'il y avait un nouvel article , que je n'ai pas eu le temps de lire hier ,et que je mourait d'envie de découvrir ...<br /> Tout simplement magnifique . C'est bien toi qui l'a écrite ????!!! C'est dingue , c'est super beau . Bravo bravo de tout mon coeur , et continue car tu est vraiment doué pour sa !!!!!
P
Parfois,on passe et on repasse,<br /> comme on repasse sa chemise,<br /> pour essayer de défroisser<br /> un amour, un être,que l'on a froissé...
B
merci pour tes encouragements Antigone, ça me fait du bien...en fait je m'étais dit que si je n'avais aucun com ce matin je l'enlevais...du coup, je le laisse...merci!!! bisous!
dansmonsacdefille
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